Soutenance de thèse Lucas Froli | 9 janvier 2025

M. Lucas Froli (Université de Montpellier) a soutenu le 9 janvier 2025 sa thèse de doctorat en droit, mention histoire du droit, intitulée La Révolution et la famille. La réception du droit révolutionnaire dans le département de l’Hérault, sous la direction du professeur Carine Becharef Jallamion. 

La composition du jury était la suivante :

  • Carine Becharef Jallamion, professeur à l’université de Montpellier, directrice de thèse
  • Florence Bellivier, professeur à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
  • David Deroussin, professeur à l’université Lyon III Jean Moulin, président
  • Jean-Louis Halpérin, professeur à l’Ecole normale supérieure, rapporteur
  • Sébastien Le Gal, professeur à l’université Grenoble Alpes
  • Marta Peguera Poch, professeur à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, rapporteur

Résumé. Durant la Révolution, les députés adoptent des lois consacrant des principes inédits au regard des règles juridiques qui étaient applicables en France durant la Monarchie. Par exemple, alors que la religion catholique interdisait aux époux de divorcer, cette faculté est désormais permise par la Révolution. D’autre part, le droit des successions de l’Ancien Régime était marqué par une caractéristique majeure : l’inégalité entre les héritiers. Les garçons étaient avantagés aux dépens des filles, les aînés l’étaient aux dépens des puînés, l’enfant légitime l’était sur l’enfant illégitime. La Révolution supprime ces avantages et impose l’égalité entre tous les héritiers, quels que soient leur sexe, leur ordre de naissance ou leur qualité (légitime ou illégitime). Par ailleurs, les députés réforment en profondeur l’organisation judiciaire de la France. Leur objectif est de lutter contre le pouvoir des juges, en réaction à l’empiétement des Parlements de l’Ancien Régime sur le pouvoir législatif royal, et de limiter la nuisance des juristes (présumés procéduriers et hostiles à la Révolution par les députés). L’objet de cette thèse est ainsi d’étudier comment les citoyens du département de l’Hérault appliquent ces nouvelles lois. Sont-ils favorables à ces nouveautés ou restent-ils indifférents à leur égard ? La législation révolutionnaire correspond-elle à l’évolution des mœurs ou est-elle seulement guidée par un idéal politique et philosophique détaché de la réalité populaire ? Cette thèse analyse également la légalité des décisions des arbitres et des tribunaux auxquels les députés révolutionnaires confient l’application des réformes qu’ils réalisent dans le domaine des successions et du divorce. Ces individus suspectés d’être anti-révolutionnaires et procéduriers appliquent-ils correctement les réformes des députés ou restreignent-ils leur portée ? Afin de répondre à ces interrogations, les archives analysées des actes de divorce, des actes de naissance d’enfant naturel, des archives notariales, des sentences arbitrales et des jugements. Ces documents suggèrent que le divorce et l’égalité successorale sont désirés par une partie de la population. Sur ce point, la législation révolutionnaire correspondrait à certaines aspirations populaires. Le divorce permet à des couples séparés factuellement depuis de longues années de convertir cette désunion de fait en séparation de droit. Le divorce permet également à de nombreuses femmes violentées par leur mari de s’affranchir de ce dernier en rompant leur lien matrimonial. L’égalité successorale consacrée par le droit révolutionnaire est quant à elle pleinement mise en œuvre par les citoyens. Les partages successoraux faisant application des nouveaux principes égalitaires sont nombreux. Une réforme particulière ne semble pas, en revanche, connaitre le même accueil populaire. Si la Révolution accorde une capacité successorale inédite aux enfants naturels, les pères de descendants illégitimes reconnaissent rarement leur filiation devant l’officier de l’état civil. Cette reconnaissance est pourtant nécessaire afin de permettre aux enfants naturels de succéder à leurs parents. En conséquence, cette nouvelle capacité successorale ne parait point en accord avec les mœurs. S’agissant de la légalité des décisions de justice, l’ensemble des réformes révolutionnaires entreprises dans le domaine des successions et du divorce sont correctement appliquées par les arbitres et les juges. Ces derniers assurent ainsi l’effectivité du droit révolutionnaire dans l’Hérault. 

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